Avec 1500 milliards d’euros, le crime est la première entreprise planétaire
le 27/07/2011 à 05:00 par Dossier réalisépar Raymond Couraud
La criminalité mondiale « pèse » entre 1000 et 1500 milliards d’euros, preuve que les mafias ont bel et bien compris la mécanique de la mondialisation.
Quelle différence y a-t-il entre une éolienne et un champ de pavot ? Aucune, aux yeux des mafieux, qui investissent dans l’une comme dans l’autre.
Voici quelques mois, la police italienne a arrêté un homme d’affaires sicilien qui avait investi, pour le compte de la mafia, dans le parc éolien de la grande île. Les policiers ont saisi à cette occasion un beau butin équivalant à 1,5 milliard d’euros, investis dans une centaine de villas et des grosses voitures.
Ce recyclage des mafieux dans l’écologie n’a rien de nouveau. Ils ont déjà « investi » dans le très compliqué marché de la taxe carbone, qui permet aux entreprises de vendre de véritables droits de polluer. D’après les organisations spécialisées dans la criminalité, le crime organisé fait aussi de juteux profits en travaillant sur les déchets. La seule fraude à la TVA, grâce aux merveilles de l’informatique et du numérique, rapporterait 5,5 milliards d’euros aux mafias qui sévissent au sein de l’Union européenne.
Tous ces nouveaux trafics complètent les profits tirés des activités traditionnelles des mafias et autres cartels mondiaux. Le crime organisé génère annuellement entre 1000 et 1500 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Lors d’un colloque qui s’est tenu au mois de février dernier en Allemagne, le criminologue Alain Bauer a estimé qu’avec tout cet argent, la puissance du crime lui permettrait d’avoir sa place parmi les pays les plus riches du G8. La mafia italienne, à elle seule, gérerait en Europe un patrimoine annuel estimé à 600 milliards d’euros.
Alain Bauer souligne la dangerosité des mafias en la comparant au pouvoir de nuisance d’Al Qaïda, qui serait « une mascarade, comparée au développement massif du crime organisé ».
Le « marché » du crime européen est en pleine évolution depuis une vingtaine d’années, avec l’arrivée massive des mafias d’Europe de l’Est ou de l’ancienne URSS. Selon le dernier numéro de l’hebdomadaire Le Point, « l’élite de la mafia de l’ex-URSS prospère en France ». Au premier rang de celle-ci, on trouve les Géorgiens, qui investissent et meurent beaucoup sur la Côte d’Azur.
Le phénomène a de l’ancienneté. Depuis l’arrivée, dans les années 90, des mafieux de l’Est « une pluie de millions s’est abattue sur l’immobilier de la Côte d’Azur et à Paris ». Ils ont ensuite pris la direction de Marbella. La cité balnéaire espagnole est devenue au fil des années l’équivalent de l’île de la Tortue pour les flibustiers d’antan. Ils y vivent de leurs rentes, quand ils ne tombent pas sous les balles d’un rival.
Au hit-parade des mafieux, les Géorgiens sont concurrencés par les criminels originaires des Balkans. Ce n’est pas nouveau. Du temps du communisme, la route de l’héroïne franchissait, par on ne sait trop quel miracle, les frontières assurées hermétiques de certains pays communistes.
La chute du Mur de Berlin a libéré les ardeurs des criminels. De l’exploitation des êtres humains au recyclage de l’argent sale, Roumains ou Albanais ont bâti de petits empires.
Tout cela n’empêche pas les mafias de se partager les marchés. Ainsi, l’enquête du Point montre que les Italiens cohabitent avec les Bulgares ou les Roumains à Strasbourg.
Face à ces réseaux planétaires, adeptes de l’économie dématérialisée, les autorités françaises et européennes « frappent au portefeuille » les délinquants, qui craignent bien plus d’être ruinés que de passer quelques années en prison. Mais les saisies effectuées ont des allures de gouttes d’eau dans l’océan de l’argent sale.
le 27/07/2011 à 05:00 par Dossier réalisépar Raymond Couraud